Louise Desrenards on Wed, 23 Nov 2016 20:51:46 +0100 (CET) |
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Partie intégrale pouvant faire l'objet d'un échange standard avec la version du précédent email. Excuses. Fillon -- le populisme Pour répondre à des commentaires sur l'élection de Fillon au premier tour des Primaires de la droite j'ai à peu près rédigé ce qui suit dans le fil de discussion sous un lien vers un article du Guardian (consacré à la sortie de Sarkozy) dans la page d'un ami et je le développe un peu : Mon point de vue. Fillon, ce n'est pas vraiment pire que Sarkozy -- ce serait semblable si son programma n'arrivait pas comme un renforcement du pire derrière le mandat de Hollande. Parce que c'est la même politique mais renforcée que celle des deux autres Présidents. Aucune régression dans l'abolition du mariage homosexuel, mais la suspension de l'espoir proche que les couples homosexuels puissent adopter ou plutôt faire naître leurs enfants ; si l'adoption avait progressé par contre ce n'était pas encore complètement acquis -- la question des mères porteuses. Il est probable que le cas politique de Fillon -- ami de Roselyne Bachelot qui avait pris position pour la loi Taubira et avait institué le PACS -- ne change rien à la situation actuelle. Mais oui, une sorte d'hyper-libéralisme dur dans une vision thatchérienne de fait (probablement). A remarquer incidemment que Le Pen n'aurait aucune chance si la gauche française n'avait pas adopté le projet libéral sans coup férir (mais c'est le projet européen). La question du choix de Fillon est celle du populisme. Il paraît parfaitement correspondre à un choix populiste de droite (pas un populisme d'extrême droite) si on remarque ceci : -- pas d'affaires juridiques sur le dos (le seul parmi les 3 principaux candidats), -- hors de la bureaucrate oligarchique -- il n'a pas fait ses études dans une Grande École (le seul parmi les 3 candidats principaux) mais seulement à l'université et a un peu pratiqué la recherche, -- il n'est pas membre ni hôte annuel du groupe Bildeberg (le seul parmi les trois), -- Adepte du multilatéralisme libéral géoéconomique et géopolitique (ce que les populations multiples et les minorités aiment car elles en ressentent plus d'équité) -- la rigueur ultra-libérale peu importe qu'elle soit austéritaire ou pas puisqu'elle mène aux même appropriations et privations : Thatcher était un Premier ministre populiste même si elle était impopulaire chez ceux qu'elle détruisait. -- Retour aux alliances gaullistes libérant de l'oppression de l'empire atlantique. -- Contre les guerres. Donc une droite populiste de classes moyennes de centre droit et de droite et de patronat corporatiste qui intègre l'adhésion de certains grand patrons libéraux -- du moment que pour changer il leur soit cette fois garanti un homme politique non recherché par la justice. Le problème électoral posé par la droite et l'extrême droite est leur pluralité populiste cadrée par l'impossibilité qu'un populisme de gauche ne se lève pour y faire face, (ne serait-ce qu'à un pop libéralisme radical comme celui représenté par Fillon). Qu'est-ce qui pourrait construire un populisme de gauche tel que Chantal Mouffe pense qu'il serait salvateur ? D'abord le populisme c'est la réaction politique populaire (ni bien ni mal). Ce n'est pas le mal insufflé aux masses par un leader. Ce sont les voix brutes qui montent dans les sociétés aux constitutions démocratiques ou républicaines électorales défaites ou trahies. Et parce que c'est vital c'est irréductible sauf sous des dictatures dures. Comme tous les candidats majeurs de ces Présidentielles sont libéraux -- Montebourg inclus, -- ce populisme de gauche ne peut-être construit s'il ne trouve pas une gauche radicale ou non radicale mais également anti-libérale pour se rassembler, car hors l'anti-libéralisme aucun changement n'est possible vu l'orientation générale de l'échec socio-politique économique sous les pactes libéraux. Ce cas impossible est exactement ce qui laisse un boulevard à Marine Le Pen ou à d'autres dans d'autres pays de l'UE (car pour le reste, dans les pires domaines dont la xénophobie, elle n'est pas particulièrement originale parmi toutes les droites -- et encore elle n'est pas radicalement anti-libérale mais s'en trouve attribuée par les signes. L'autre point est corollaire. Ce qui empêche de combattre par un populisme de gauche le populisme de droite est la négation de gauche de la necessité et du rôle social de la souveraineté -- le repérage que la souveraineté ne soit pas le nationalisme (qui regarde l'identité nationale telle l'extrême droite ou même Stéphane Le Foll tant de monde y aurait-il dans son identité exemplaire), que la souveraineté soit celle des peuples (seraient-ils émigrés) dans une démocratie ou une république à savoir : la souveraineté électorale comme structure consensuelle de base. Un pacte citoyen des décisions miroir des consultations électorales, irrévocable. Et ce qui en résulte au niveau de l'administration de l'Etat. Non le nationalisme comme identité. La souveraineté à gauche est une souveraineté solidaire à l'intérieur comme à l'extérieur. En fait, le populisme des électeurs émergent des démocraties détruites est manifeste jusque dans les primaires de la droite traditionnelle et se désigne indépendamment des choix des partis (d'où l'obsolescence des sondages). C'est une chance historique pour la gauche radicale et la jeunesse dans la mesure où elles furent ensemble et nombreuses dans la rue et fortement réprimées durant ce mandat. Cela s'appelle des mouvements. Pourquoi anti-libéral ? Parce que le monde libéral n'est pas seulement celui du marché local mais celui du marché unique et de la transformation globale de la planète qui la mène à sa destruction. Dans le macro-monde détruit du néo-libéralisme réalisé, seule la multiplicité des micro-mondes solidaires permet d'envisager un renversement de l'entropie de telle sorte que la planète détruite peu à peu revive ici et/ou là, peu à peu -- au moins pour redevenir peu à peu vivable. Pourquoi la souveraineté ? Pour que les décisions de changer l'ordre des choses soient réalisables, c'est à-dire justement pas globalement mais micro-réalisables. Peut-être que la gauche française va réagir et enfin lever ses tabous sur le populisme, parce que les gens sont prêts pour ça, tout le monde sait -- le peuple dont les gens de gauche inclus -- qu'aucun programme de gauche n'est réalisable s'il n'est pas souverain par rapport à Bruxelles, ce qui ne veut pas dire obligatoirement le Frexit mais peut y conduire en cas de refus de l'UE, un des points de la frilosité générale et/ou de fixation de la peur globale -- évidemment instruite en menace par l'oligarchie libérale et fantasmée par les électeurs. Mais malheureusement je crains que cela ne serve à rien : parce que les partis de gauche sont conservateurs sur leur histoire, et unilatéralement dans la même politique que celle qui se succède par rapport à l'UE. L'antilibéralisme sans souveraineté n'est pas crédible, car il est contradictoire avec l'abandon de souveraineté auprès de l'UE libérale. Tout le monde le sait et aucun électeur même de gauche ne se lèvera en nombre pour un programme qui ne se donne pas les moyens de se réaliser, une fois de plus. Sauf Mélenchon personne ne l'a pris en compte. Et encore depuis un certain temps il s'est ramolli sur ce tandem gagnant qui le rend victime d'un boycott de la gauche des partis -- et de ses élus, -- jusqu'à le priver de ses signatures. Peut-être qu'à la fin du parcours nous aurons Le Pen -- justement sur ce boulevard ouvert par la défaillance de la gauche -- contre Fillon... et pourtant Le Pen n'est pas radicalement anti-libérale ce que devrait être la gauche. Droite radicale et extrême droite, au temps où -- au lieu de -- la gauche radicale pourrait emporter la victoire, comme depuis longtemps la situation ne lui avait été aussi favorable (mais à condition qu'elle prenne des responsabilités par rapport au changement porté par les masses). On a vu contrairement à ce que les médias voudraient faire croire que ce sont les votes radicaux de gauche des régions attachées au Labour qui ont fait basculer la balance pour le Brexit. Le résultat de vote Trump donne à comprendre que le retrait de Sanders lui a permis de l'emporter face au conservatisme progressiste de Hillary Clinton. Défendre le libéralisme, quand ceux qui l'ont inventé et l'on porté à ses plus grands profits avec les organisations supra nationales, le libre-échange unilatéral fondateur de la globalisation géoéconomique et les Hedge Funds fondateurs de la dystopie financière, s'en délient est, ne serait-ce que techniquement, une absurdité historique. Pour autant sans un candidat populaire de la gauche radicale en France les gouvernements franco-européens continueront à l'entraîner dans la grande descente unilatérale à pic, celle du triomphe du néo-conservatisme impérial dans sa catastrophe finale. Si la gauche y compris radicale nie la nouvelle émergence des populismes, elle pourrait bien mourir de cette cécité, (avoir dénié les mouvements de peur de perdre les partis). Et moi j'en serais un témoin impuissant, non coupable (puisque ma participation n'y changerait rien, n'étant pas souveraine): celui de mon retrait définitif des urnes. -- ----- _______________________________________________ Nettime-fr mailing list http://www.nettime.org/cgi-bin/mailman/listinfo/nettime-fr