Louise Desrenards on Sat, 8 Mar 2003 14:53:49 +0100 (CET)


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[nettime-fr] FW: [multitudes-infos] La Loi et la règle


Traduction: 
Source Mutitudes Liste,
de la part d'un inscrit.

Quote
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De : (...)

Date : Sat, 08 Mar 2003 12:12:55 +0100
À : Aliette Guibert-Certhoux <aguibert-certhoux@noos.fr>
Objet : FW: [multitudes-infos]  La Loi et la règle
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http://www.kuro5hin.org/story/2003/3/2/113123/1408
(...)

Lettre de démission de John Brady KIESLING, conseiller Politique à
l'Ambassade US à Athènes, après plus de vingt ans de carrière, notamment
à Tel-Aviv, Casablanca et YerevanŠ


Monsieur le Premier Ministre,

        Je vous écris pour vous signifier ma démission du Ministère des
Affaires Etrangères des Etats-Unis et de ma fonction de Conseiller Politique
à l'Ambassade américaine à Athènes, à dater du 7 mars. Je le fais le c¦ur
lourd. Mon éducation incluait un sens du devoir vis-à-vis de mon pays.
Servir les Etats-Unis en tant que diplomate était donc un rêve. J'étais
payé pour comprendre les langues et les cultures étrangères, pour
rencontrer des diplomates, des politiciens, des savants et des
journalistes, afin de les persuader que les intérêts américains et les
leurs coïncidaient. La foi que j'avais dans mon pays et dans ses valeurs
était l'arme la plus puissante de mon arsenal diplomatique. Il est
inévitable qu'en vingt années de service, je devienne plus
sceptique et cynique en regard des motifs purement bureaucratiques,
égoïstes et étroits qui ont parfois tracé les contours de nos
politiques. La nature humaine étant ce qu'elle est, j'ai été récompensé
et promu parce que je la comprenais. Cependant, jusqu'à l'arrivée de ce
gouvernement, il m'a été possible de croire qu'en soutenant la politique
de mon président, je promouvais aussi les intérêts du peuple américain
et du monde. Je n'y crois plus.
        Les politiques que l'on nous demande maintenant de promouvoir sont
incompatibles, non seulement avec les valeurs américaines, mais avec les
intérêts américains. Notre acharnement à vouloir la guerre avec l'Irak
nous mène à gaspiller la légitimité internationale qui fut l'arme la
plus puissante des Etats-Unis depuis l'époque de Woodrow Wilson. Nous
avons commencé à démanteler le réseau relationnel le plus étendu et le
plus efficace que le monde ait jamais connu. Notre trajectoire actuelle
ne peut qu'apporter instabilité et danger, au lieu de la sécurité.
Le sacrifice de ces intérêts globaux à la politique intérieure et à des
intérêts égoïstes n'est pas nouveau, et ce n'est certes pas un problème
purement américain. Cependant, nous n'avions pas connu une telle
distorsion systématique des informations, ni une manipulation aussi
systématique de l'opinion publique américaine depuis la guerre du
Viet-Nâm. 
        La tragédie du 11 septembre nous avait laissés plus forts
qu'avant, rassemblant autour de nous une vaste coalition internationale
prête à coopérer pour la première fois d'une manière systématique contre
la menace du terrorisme. Cependant, au lieu d'utiliser le bénéfice de ce
succès et construire quelque chose de solide sur cette base, ce
gouvernement a choisi d'utiliser le terrorisme comme un argument de
politique intérieure, enrôlant un Al Quaïda dispersé et largement
affaibli comme allié administratif. Nous avons répandu une terreur et
une confusion démesurée dans le public, liant arbitrairement deux
problèmes sans relation, le terrorisme et l'Irak. Le résultat, mais
peut-être aussi le motif, a été de justifier le déplacement à mauvais
escient de fonds publics en décroissance vers les dépenses militaires et
d'affaiblir les garde-fous qui protègent les citoyens américains de la
lourde main du gouvernement.
        Le 11 septembre n'a pas fait autant de mal
à la structure de la société américaine que ce que nous semblons
déterminés à nous infliger nous-mêmes. La Russie des derniers Romanov
est-elle notre modèle, un empire égoïste et superstitieux fonçant vers
l'autodestruction au nom d'un statu-quo condamné d'avance? Nous devrions
nous demander pourquoi nous n'avons pas réussi à persuader
plus de gens qu'une guerre avec l'Irak soit nécessaire. Au cours des deux
dernières années, nous en avons trop fait, persuadant nos partenaires
dans le monde que des intérêts américains, étroits et financiers,
passaient au-dessus de leurs valeurs les plus chéries. Même quand nos
buts n'étaient pas contestables, notre cohérence l'a été. L'exemple de
l'Afghanistan réconforte peu nos alliés lorsqu'ils se demande sur
quelles bases nous voulons reconstruire le Moyen-Orient, dans l'intérêt
de qui? Sommes-nous vraiment devenus aveugles, comme la Russie l'est en
Tchétchénie, comme Israël l'est dans les territoires occupés, pour
ignorer qu'un pouvoir militaire écrasant n'est pas la réponse au
terrorisme? Lorsque les ruines de la guerre en Irak s'additionneront à
celles de Grozny et de Ramallah, qui donc s'unira encore à qui, pour
aller vers où nous menons?
            Nous disposons encore d'une coalition solide. La loyauté de
beaucoup de nos amis est impressionnante, un tribut au capital moral que
l'Amérique a accumulé au cours du siècle dernier. Cependant, nos alliés sont
moins persuadés du fait que la guerre soit justifiée que du danger de
laisser les EU glisser dans un complet égocentrisme. La loyauté devrait être
réciproque. Pourquoi notre Président tolère-t-il la manière fanfaronne
et méprisante de son gouvernement, même aux plus hauts niveaux, avec
lesquelles il traite nos amis et alliés?
        Je vous en prie, écoutez les amis de l'Amérique partout dans le
monde. Même ici, en Grèce, que l'on dit être le siège de l'anti-américanisme
le plus virulent, nous avons plus d'amis et plus proches que le lecteur
moyen de la presse américaine ne peut le supposer. Même lorsqu'ils se
plaignent de l'arrogance américaine, ils savent que le monde est un
endroit dangereux et difficile et ils veulent un système international
solide, avec les Etats-Unis et l'Europe travaillant main dans la main.
Quand nous inquiétons nos amis plutôt qu'ils s'inquiètent pour nous, il
est temps de se faire du souci. Et maintenant, ils sont inquiets. Qui va
leur dire de manière convaincante que les Etats-Unis sont toujours,
comme ils l'étaient, un phare de liberté, de sécurité et de justice pour
la planète?

        Monsieur le Premier Ministre, j'éprouve beaucoup de respect pour
votre personnalité et vos compétences. Vous avez sauvegardé pour nous plus
de crédibilité internationale que n'en mérite notre politique et maintenu
un aspect positif à ce gouvernement, malgré ses excès idéologiques.
Cependant, votre loyauté envers le Président va trop loin. Nous exigeons
trop d'un système international que nous avons peiné à construire, son
réseau de lois, de traités et d'organisations qui ont maintenu à l'écart
nos ennemis plus qu'ils n'ont jamais limité la capacité de l'Amérique à
défendre ses intérêts.
        Je démissionne parce que j'ai échoué à faire coordonner ma
conscience et mes capacités à servir le présent gouvernement. Je garde
cependant confiance dans le fait que notre système démocratique soit
auto-correcteur. J'espère que, d'une toute petite manière, je pourrai
continuer de l'extérieur à définir des politiques qui serviront mieux la
sécurité et la prospérité du peuple américain dans le monde que nous
partageons.


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