Louise Desrenards on Sun, 14 May 2006 17:00:06 +0200 (CEST)


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[nettime-fr] Des ouvrages en papier et en ligne


Si déjà classique c'est pas tendance : vous n'avez pas encore ce bouquin
bientôt culte ? II est temps de vous le procurer chez "caméras animales" de
François et Mathias Richard, l'éditeur passion. On en reparlera bientôt...

    http://www.camerasanimales.com/index3.html

Je l'avais annoncé avec le lien, le voici intégral.

Et c'est toujours dans le, tous les mois et demi,

http://www.sklunk.net

tout en spip modelé par Quentin Drouet pour Pierre Bongiovanni
 qui l'édite :  N°3, De la politique.

Dernier opus, dense, épatant :

===>  avec un NEW super agenda d'événements cartographié, en expérimentation
sur spip, où vous pouvez proposer vos informations...
http://www.sklunk.net/AGENDA,113


Mon titre suivant pour Thierry, en hommage
à Jackson Pollock
Et à 

         Sylvain Courtoux,
 
Action-poétique

Action-writing http://www.lelibraire.com/din/tit.php?Id=52608
    In Sitaudis, Remue.net, Matricule des anges, Hermaphrodite, etc.
    Et même in : 
http://www.criticalsecret.com/n11_12/sommaire.html  :
(autorisez les popups ça vaut le coup si vous voulez cliquer dans le mini
algorithme de Hidekazu Minami, et qui est le sablier du N°11/12)

      "BIENVENUE A NIHIL INC."
       Sylvain Courtoux

//////////////////////////////////////



T H I E R R Y - T H É O L I E R
Action e-writing : Crevard [baise-sollers]
 
"Alors je pars en balade. Non pas au bout du monde (le monde est sans queue
ni tête), mais d¹un quartier à l¹autre.
Paris à la marche, Paris par les pieds, Paris sous les semelles. (?)"

Henri Calet, Le tout sur le tout


    Trop de monde au long des années a craché sur Sollers, à commencer par
les situationnistes, pour que ce vieux leader défait de son avant-garde
styliste et polémiste, devenu traditionnellement éditeur ne soit pas, au
bout du compte, loin d¹un tas de fumier menaçant les voitures qui quittent
malencontreusement la route, l¹incontournable borne kilométrique rassurante,
augurant de la proche étape, dans l¹épreuve du labyrinthe infligée aux
écrivains débutants qui s¹engagent dans l¹écriture critique expérimentale.
Ceux qui battent du c¦ur au point qu¹on se fiche qu¹ils puent des pieds
(sixties en référence). Par là je veux dire : même s¹il ne font pas partie
de la Hype douchée ou rincée par les crevards.

Voici Crevard, un baiseur.

[Je n¹ai jamais compris au nom de quoi il en fut d¹assez purs pour protester
de la présence de Sollers à la porte de la prison contre l¹arrestation de
Cesare Battisti].

 Camarade baiseur com-battant au pavé taillé ? ce n¹est pas con-battre mais
a-battre avec, contrairement aux apparences : hacher menu le mot et la
phrase ? écraser les toasts avec ses mâchoires et liquider le champagne des
buffets aux événements d¹art et de culture. Dire à son voisin le
substantifique fiel ? réactualiser la nouvelle, le souvenir ironique qui
prépare la prochaine rencontre comme une perle, et pour les enfiler il fait
un bouquin. Typo-graphiquement, photo-soniquement, mettre bas son
vocabulaire ? hacker la langue Thierry Théolier : faire-écrire/ vivre
critique, dans l¹¦il vide du cyclone.

Entendre les journées vaines passer au tapage nocturne des secondes.
Ce n¹est pas lalangue de Pierre Guyotat, c¹est sal-angue de thth, égale à
son vocabulaire immédiat quand il har-angue pour être entendu malgré les
fenêtres fermées, si tu n¹as pas une grande voix alors il faut travailler
davantage l¹énergie des mots, bullshit qui tire plus vite que son nombre,
faire saigner le verbe, saigner de signer et la chose s¹appelle Crevard
[baise-sollers]. Au moins Crevard, le bouquin sans diffuseur ni
distributeur, ne dédaigne-t¹il pas Sollers, il le baise, avec la dégaine
d¹une caméra animale (celle de l¹éditeur qui en tient apparemment plusieurs
grâce à l¹S). Chaque phrase dégaine un plateau tournant, chaque chapitre
dégaine un reportage socio-technique, chaque mot dégaine un cliché
photo-numérique. Pas le temps de crier gare au feu : Feu !/ Feu !/ Feu !

Mais t¹es pas mort. C¹est juste ce qui encombre ta vie malgré toi, qui te
colle aux adidas dès que tu bouges un pied sur les trottoirs sans mégot où
seules les merdres de chien (bonjour, Demain les chiens), alors que le bruit
alentour qui en résulte ne raison-ne même pas comme une trace de civilité
quand elle parle mou, sur la pointe des pieds pour ne pas salir leurs
Timberlands, et qui explose à raison de plusieurs détails par page. Ce
tendant à montrer le tout explosif par lui-même. Ainsi tu vis. Ce n¹est pas
morbide d¹y trouver de la force vitale, jubilatoire même. Cela s¹appelle
même l¹espoir ? du lendemain.

Crevard : rien à voir avec le fêtard mélancolique de La Fanfarlo. Ce n¹est
pas la « peau de chagrin » de sa vie qu¹il découvre mais l¹entropie de son
ouvrage dans la fête.

Mais encore, baise-sollers rime-t¹il avec best-seller. Je laisse au lecteur
l¹interprétation évidemment critique, éventuellement dépressive, impulsive,
agressive, quand ce qui m¹y intéresse n¹est autre que la clé transgressive,
les métaphores en ellipse dans l¹instantané, en quoi le livre à l¹avenant va
bondissant dans les quarantièmes rugissants, cette zone des quarante degrés
de latitude sud, où le vent soufflant en tempête peut donner à entendre le
fond de cristal hurlant des voix fantomatiques du monde en déshumanisation.
A force de se faire prendre pour la nature, la ville en queue a fini par
dissoudre sa référence dans le vent, puis elle a plongé dans les gouffres
hurlants des liquidités non partagées. Et donc prends-en ce que tu peux
avant qu¹elles ne sombrent.

Ce n¹est pas en place de pied-de-nez si Gavroche montrait son cul (quoique,
mieux vaut se garder d¹exhiber sa plus étrange extrémité, c¹est alors la
couverture de Crevard ? agite tes cheveux et fais-en ton masque). Serait-ce
un hommage, un signe qui donne la mesure du texte annonçant baise-sollers ?
Gavroche déjà tirait le mot de l¹autre, la gueule par terre pensant à
Voltaire, le nez dans le ruisseau pensant à Rousseau : toute la différence
entre la Hype et les casseurs de Hype, c¹est que les derniers cassent aussi
la philo. Était-ce vraiment/ est-ce vraiment la langue de Hugo ?
Pour l¹acteur(e) interactif qui autrefois a pu ressentir la réplique
stressante de l¹interactivisme e-pistolet-aire des nombreux avatars
e-planétaires de Thierry Théolier, le mondiophone ? à ne pas s¹y perdre
puisqu¹il est clairement lui et nous voyons que cela tienne encore à la
localisation du texte ? c¹est le pointeur de la contraction/ contradiction
(lire contracFion/ contradicFion), le populo non populiste qui crie au
secours, j¹rêve pas, c¹est aussi moche que ça, la hypo-culture de fr, et
d¹ailleurs t¹as ka lire la fête socio-poétique que j¹en fais, ma parole et
hop v¹la l¹concept.

Leader de listes et chroniqueur de blogs qui a pris la communauté au sens
vivant, la coupe aux lèvres des mots flamingos rendus finalement laconiques,
c¹est l¹activiste erre-miste scrypto-mondain en groupe et en ville qui
l¹écrit ailleurs, dans la langue critique qu¹il invente en ermite quand il
rentre dans son studio ? comme un vétéran. Une langue au chat après le rock
n¹roll l¹art et la philosophie, contre les riches imbéciles cadres sups ou
nomenklatura, pas contre les pauvres andouilles dans mon genre ? dirait
l¹autre ? pour ne pas dire dans le tien. P... d¹autonomie machinale.

C¹est plus fort que toi.

La langue verte, le verlan, le rappy et les e-brèv-iations, tout ça c¹est
derrière lui, de la merdre en petits pois ou de l¹e-pisse-témologie. Lui il
invente autre chose, ça fonce, fulgurant du dedans, et c¹est pour ça qu¹on
s¹y retrouve ? toujours une bombe. Chaque altération graphique ou
typographique, ce n¹est pas pour niquer le lecteur avec le langage initié
des abréviationnistes du www, ni celui des halls vernissés, cela ne fait pas
bande comme le sont paradoxalement les casseurs de Hype qu¹il rassemble,
d¹autant plus qu¹ils bandent (aussi les filles ne s¹en battent pas les
couilles comme elles n¹en ont pas) ? mais au contraire s¹arrache du jargon
communautaire pour inventer son verbe public au-delà, et qu¹on peut toujours
prendre pour de la com, parce que le succès commence toujours par un
malentendu.

Et mission accomplie.

Chaque sentence vue se lit muette avec les oreilles, plante à la fois l¹idée
et son interprétation polysémique ? trans-phonétique. Y a pas distance,
c¹est l¹immergence critique de l¹objet/ non objet (l¹humain). Y a pas
jugement, c¹est bien pire, la clochette du signe et du nombre frenglish fait
tinter l¹environnement social de ses nouvelles racines numériques, emprunte
au dedans de l¹air qui flotte au dehors, c¹est maintenant. Tous on s¹y
reconnaît, des fois tu rigoles, des fois ça t¹agace, ce mécanisme musical à
décrypter la société à travers le déplacement techno-typo dans le mot c¹est
du boulot ; la galère de la culture et de l¹art quand les rapports sociaux
sont brisés dans la globalisation, quand la néo-libéralisation rompt le fil
politique, c¹est encore la galère de la post-philosophie qui empoisonne ce
qu¹elle réifie au lieu d¹inventer aut¹chose ou de se taire. Ce monde aux
termes déformés, dilatés, n¹est pas le nôtre/ c¹est le nôtre : il ne faut
pas le prendre au sérieux, il faut le scratcher, le biffer, le rayer, ce
n¹est qu¹un tigre convertible en papier ? il en fait un tigre en papier : la
nullité de la Hype vaut pour tout le monde.

Le papier décoré de rayures viré en motifs tachés rebondit, furieux papillon
de vie. Ce n¹est pas lui mais sa touche qui écrit le chaos et le chaos qui
l¹écrit. Panthère des neiges revient de disparition : qui le croirait
écrivain ? C¹est pourtant une fiction vraie à quatre dimensions : réelle,
symbolique, imaginaire ? sociale. Thth, et s¹il avait une gueule de graffiti
(pas d¹e-con-home) en place d¹atmosphère ? Alors ce n¹est pas le discours
qui philosophe, entre paroles musiques et pamphlet et les moyens requis,
substitutions poly-linguistiques installées au c¦ur de nos maternelles
francophonies, c¹est le langage du métisse quand après parler au lieu de
continuer à boire il participe d¹inventer la langue des livres suivants.
 Le premier bouquin de Thierry Théolier ne résume pas ses actes d¹écrivain à
un seul livre, même s¹il n¹y en a pas eu d¹autres jusque là. C¹est un
chroniqueur du Web mais ça ne donne pas un livre de chroniqueur ni de
journaliste, parce que l¹information qu¹il apporte n¹est rien d¹autre que ?
ce qui est beaucoup ? non le miroir, l¹intensité virtuelle destructrice de
la communication numérique elle-même, appliquée in vivo aux situations
urbaines post-culturo-spectaculaires. Donc, la fiction vraie du mode de vie
déplacé par le blog, la liste, puis le livre en feed-back, après avoir
l¹avoir matériellement, activement, stigmatisé en ville. Il pose un statut
vide des protocoles sociaux égaux aux typographies, les confrontant à des
épisodes traditionnels (réflexions, faits et récits), de sorte qu¹on ne
navigue pas dans un univers codé, mais dont les codes s¹installent et se
décodent d¹eux-mêmes à vue dans leur environnement composé.

C¹est donc un livre de défi : que cette écriture entre journaliers et essai
soit publiable, non pour dire que ce soit possible ? on aurait alors vu pire
du point de vue des conventions ? mais qu¹il s¹agisse d¹une langue
littéraire baise-sollers, dans tous les sens du mot et au fond sans
l¹atteindre lui-même, puisque ne s¹agissant pas de Sollers mais de ce qu¹il
représente. C¹est-à-dire le principe de l¹édition des Lettres expérimentales
françaises dans leur carcan, qui les rend inaccessibles à l¹exercice
infra-critique à travers lequel elles sont définies, de la production du
livre à ses genres comme marchandise. Quand le pamphlet social cyber-cultivé
transfigure la matière livresque par l¹autobiographie journalière, un pied
dans le vide un pied dans la soupière, alors, l¹autobiographie s¹effectue à
la fois en mode de vie et en rituel critique du temps réel, et percute
radicalement l¹environnement de ses modèles ? pourvu qu¹elle se fasse
connaître. Ce qui fait déferler, de l¹atopie d¹Internet qui se sait, aux
hétérotopies urbaines qui s¹ignorent, l¹évidence de la dérision hiérarchique
des sociétés matérialistes déprimées par la perte de l¹utopie, qui se
déroule comme une panto-mine de l¹éternnelle nouveauté en place de théâtre
des cruautés ? pourvu qu¹on le lui fasse savoir sur son propre territoire :
d¹où l¹impact recherché des supports traditionnels transfigurables par
l¹émergence. Crevard s¹y attaque.


De l¹hygiène du livre par le World Wide Web dans l?univers ruiné de la
culture :

    Vrai mais incroyable, qu¹aucun des carnets journaliers d¹auteurs
correspondant par leur vitalité à la vitalité des chroniques sur Internet,
publiés par des éditeurs traditionnels aujourd¹hui, en France, ne présente,
excepté quelques singularités stylistiques liées aux spécialités des
protagonistes narrateurs, de changement notoire avec le « genre littéraire »
qui lui est attribué depuis bientôt deux siècles. Comment un genre aussi
circonstanciel de son temps et singularisé qu¹un journal intime, dans ce
qu¹il prétend délivrer, est-il à ce point stéréotypé comme structure, comme
s¹il s¹agissait d¹un phénotype de la carte génétique littéraire, imperméable
à la mobilité de l¹environnement, au moment même où le modèle génétique
lui-même en vient à s¹estomper à l¹horizon stochastique ? sauf le mauvais
usage généralisé par les polices ?

Comment se fait-il que loin de l¹inspiration des auteurs actuels, la
marchandise littéraire d¹un pays qui se targue d¹avoir inventé l¹essai et
d¹avoir contribué à la publication des chefs d¹¦uvres modernes les plus
incompris en leur temps (par exemple Ulysse soutenu par les émigrées de la
liberté), se résume de nos jours au modèle imposé par la chaîne de
l¹édiFion, depuis la producFion jusqu¹à la distribuFion, des offices des
libraires, des aides en amont, et des récompenses qui procurent le bandeau
justificatif des vitrines en aval ? Sans pour autant produire les
best-sellers internationaux au titre desquels la marchandise littéraire
francophone du papier est modélisée par cette voie ? Alors que citations et
petit ramdam dans les émissions télévisuelles suffisent à faire un
best-seller national de n¹importe quelle petite saloperie ? et au mieux
d¹inhabituelles petites cochonneries : pourquoi pas de plus notoires
différences par exemple d¹autres genres de saloperies ?

Disons qu¹il en soit quelque uns pour passer au travers des mailles du
filet, rarement ? sans exception pas de confirmation des règles. Mais les
auteurs émergents en sont généralement à remercier leurs éditeurs héroïques
en fonds propres, des amateurs d¹objets littéraires refusés par les
diffuseurs et par les distributeurs. Parce qu¹à voir le nombre de
« produits » sans impact envahisseurs des rayons dans les librairies, il est
aisé de comprendre que nulle concurrence commerciale ne soit admise? la
place est rare, le vide est plein comme un ¦uf.

Pourquoi l¹innovation littéraire/ littéraire ne se communique t¹elle pas
comme marché du livre possible ? Parce que les journalistes et les
historiens qui remplissent aujourd¹hui ces tables ne sauraient pas s¹y
présenter en écrivains ou poètes créatifs capables de rester dans la
compétition critique du livre ? Parce que le marché du livre est devenu leur
lobby qui ne supporte pas de concurrence ?

Car les contenus sont infiniment interchangeables. Pas les formes de
l¹essai, toujours singulièrement organiques de ce qu¹elles cherchent à
exprimer.

Voilà où se situe encore le crevard baise-seller de Thierry Théolier,
aujourd¹hui visionnaire à deux titres : une fois du renouveau annoncé des
auteurs ou l¹édition crèvera du manque de crevards, et deux fois du
renouveau des genres et de l¹écriture par les actes de publication des
éditeurs amateurs, parce que de toutes façons, ça se passera comme ça ? si
on veut. Comme nous, on sait tenir en amont avec deux balles, s¹il faut en
dépenser trois, et aussi bosser sans attendre de subvention pour y parvenir.
Chat plusieurs fois échaudé finit par ne plus craindre l¹eau froide.
Et peut-être bien que le cycle finira par s¹inverser parce que,
paradoxalement, la liberté critique est l¹objet de valeur sublime, le plus
recherché, des sociétés qui la font disparaître.

À Paris, le 20 mars 2006
Aliette Guibert

http://www.sklunk.net/ALIETTE



Quelques honorables voisins


Voyage à Téhéran....
Journal de voyage, de Rokhshad Nourdeh
http://www.sklunk.net/ROKHSHAD-NOURDEH

À Belleville ! 
Pré-monde, par Hervé Breuil
http://www.sklunk.net/Chronique-d-un-pre-monde-post




 
 
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