gilbert quélennec on Sun, 24 Apr 2005 16:06:47 +0200 (CEST)


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[nettime-fr] Fwd: JAURES




> JEAN JAURES
>  
> N’APPARTIENT QU’AU PEUPLE
>  
> Le 1 mai 1905, Jean Jaurès inaugurait la coopérative viticole de 
> Maraussan, dans l’Hérault, pas loin de Béziers. Pour célébrer cet 
> anniversaire, la municipalité a commandé une statue et préparé une 
> fête. La direction du PS a voulu récupérer cette manifestation au 
> profit de sa propagande en faveur du traité constitutionnel européen. 
> Refusant cette instrumentalisation, la municipalité a annulé la 
> manifestation. François Hollande maintient son meeting auquel il a 
> convié Cohn-Bendit. Cette manœuvre a suscité la colère à Maraussan. Un 
> collectif s’est créé et il organise, le 28 avril à 17H, une fête 
> européenne pour le rejet du traité et des pratiques politiciennes de 
> ses défenseurs. Plusieurs orateurs sont annoncés. Des artistes liront 
> les textes des invités déjà engagés ailleurs. Ce soir-là je parlerai à 
> Amiens Voici le texte que j’ai préparé pour Maraussan :
>  
> « Comme il le fit, ici même, le 1 mai 1905, je vous salue, Citoyens, 
> Citoyennes !
>  
> Jean Jaurès se disait « paysan cultivé.» Il fut l’élu des mineurs et 
> des verriers. Il fut le défenseur des vignerons du Midi. Il s’est 
> trouvé à leurs côtés face aux provocateurs, face aux policiers. Face 
> aux pierres lancées contre lui. Les hommes de l’atelier comme ceux de 
> la terre ont reconnu l’homme de conviction. Ils ont admiré son courage 
> physique. Ils l’appelaient « le Grand Jaurès. »
>  
> A l’heure du choix, au moment où il faut prendre parti, Jaurès ne 
> s’est jamais dérobé, il ne s’est pas séparé de ceux qui souffrent et 
> qui tremblent et il a choisi sa place dans les tumultes de l’Histoire 
> en écrivant : « Ici, sous ce soleil de juin 1793 qui échauffe votre 
> âpre bataille, je suis avec Robespierre et c’est à côté de lui que je 
> vais m’asseoir aux Jacobins. »
>  
> Ce fils de la Méditerranée à la culture immense ne reniait aucun 
> aspect de ses origines. Parlant de la « civilisation de la langue 
> d’Oc », il insistait : « pour que la langue méridionale cesse 
> d’apparaître au peuple comme un patois, c’est-à-dire comme une langue 
> inférieure déchue des hautes idées générales et des grandes ambitions, 
> il convient qu’il apprenne à goûter dans les chefs d’œuvre de la 
> langue française la beauté classique, et qu’il puisse ainsi 
> reconnaître dans la littérature méridionale renouvelée une forme 
> originale, une expression distincte du génie hérité de Rome et de la 
> Grèce par la France totale, comme par la France du Midi. »
>  
> Cet enfant du Midi connaissait les siens. Quand la révolte des 
> vignerons culmine avec les évènements de juin 1907 Clémenceau, à 
> Paris, la traite d’abord par la dérision et le mépris. Jaurès 
> déclare : « L’évènement qui se développe là-bas, et qui n’a pas épuisé 
> ses conséquences, est un des plus grands évènements sociaux qui se 
> soient produits depuis trente-cinq ans. On a pu d’abord n’y pas 
> prendre garde ; c’était le Midi et il y a une légende du Midi. On 
> s’imagine que c’est le pays des paroles vaines. On oublie que ce Midi 
> a une longue histoire, sérieuse, passionnée et tragique. » Tragique en 
> effet, puisque Clémenceau enverra à Narbonne la troupe qui tuera.
>  
> Cet enfant du pays d’oc aimait la vigne et le vin. Le vin était selon 
> lui la « boisson nécessaire » qui devait « faire circuler dans les 
> veines de la démocratie française »  une « liqueur qui contient la 
> force, qui contient la joie, qui ranime le travail défaillant et qui 
> allège la pesanteur de l’esprit sans en compromettre l’équilibre. » Il 
> se sentait proche aussi des vignerons. Le 1 mai 1905, à Maraussan, il 
> inaugurait la coopérative viticole. A cette occasion, il leur disait 
> en occitan : « Dans une vigne, des raisins contrariants et imbéciles 
> dirent qu'ils ne voulaient pas aller avec leurs frères qui se 
> laissaient cueillir. On fit comme ils le voulaient, et ce qui se 
> passa, c'est qu'ils pourrirent sur souche, tandis que les autres 
> allèrent à la cuve, où ils firent le bon vin qui réjouit les coeurs. 
> Paysans, ne demeurez pas à l'écart. Mettez ensemble vos volontés, et, 
> dans la cuve de la République, préparez le vin de la Révolution 
> sociale! » « Dins la tina de la Republica, preparatz lo vin de la 
> Revolucion sociala ! »
>  
> Aujourd’hui, les sociaux-démocrates répètent à satiété que le 
> capitalisme a gagné et qu’il faut cesser le combat. Ceux que 
> Jean-Pierre Rioux, dénomme « les installés de la gauche impuissante et 
> vaincue » prétendent une nouvelle fois instrumentaliser la figure de 
> ce socialiste pour l’éternité que demeure Jean Jaurès. Le premier 
> secrétaire du parti de l’abandon déclare que Jaurès aurait approuvé la 
> Constitution européenne qu’on veut nous imposer. La direction de ce 
> parti a osé retoucher la célèbre et belle photo de Jaurès au 
> Pré-St-Gervais où il se tient à la hampe du drapeau rouge. Ces 
> manipulateurs ont repeint le drapeau rouge en drapeau européen.
>  
> Flanqué de Cohn-Bendit, François Hollande a tenté de récupérer à des 
> fins partisanes l’émouvant témoignage de fidélité préparé par la 
> population de Maroussian. Sont-ils tombés si bas, au point de faire 
> voter les morts, au point de travestir  l’histoire, au point de 
> mépriser le geste de mémoire du peuple de la vigne ! Que de médiocrité 
> en face d’un géant dont ils n’atteindront jamais ni la rigueur morale, 
> ni le désintéressement, ni la force de conviction, ni le courage ! 
>  
> Comment ce parti de la résignation ose-t-il dire que Jaurès aurait 
> soutenu une Constitution qui entend imposer pour des décennies une 
> « économie de marché où la concurrence est libre et non faussée »  
> alors que Jaurès craignait le pire « tant que dans chaque nation une 
> classe restreinte d’hommes possèdera les grands moyens de production 
> et d’échange, tant  que cette classe pourra imposer aux sociétés 
> qu’elle domine sa propre loi, qui est la concurrence illimitée ?»
>  
> Comment ce parti de la capitulation ose-t-il prétendre que Jaurès 
> soutiendrait une Constitution qui décide de « supprimer les 
> restrictions aux investissements étrangers » et qui décrète que « les 
> restrictions au mouvement des capitaux sont interdites » alors que 
> Jaurès déclarait au gouvernement qu’« une des conditions de l’action 
> de la France face aux puissances financières, c’est que vous en soyez 
> les maîtres et qu’elles ne soient pas les vôtres ?»
>  
> Comment ce parti qui est devenu, dans le débat sur la Constitution 
> européenne, le parti du mensonge – sur la démocratie, sur la laïcité, 
> sur les droits sociaux, sur les services publics, sur le système 
> économique – ose-t-il invoquer un Jaurès qui répétait « Le courage, 
> c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la 
> loi du mensonge triomphant qui passe » ?
>  
> Comment ce parti, qui soutient la Constitution voulue par le MEDEF, 
> ose-t-il s’approprier celui qui déclarait « entre le capital qui 
> prétend au plus haut dividende et le travail qui s’efforce vers un 
> plus haut salaire, il y a une guerre essentielle et permanente » et 
> qui ajoutait : « le socialisme est la conscience de l’Europe » ?
>  
> Jaurès, nul ne l’ignore, était hanté par le danger de la guerre. Il a 
> prôné la paix entre les peuples, la paix entre les femmes et les 
> hommes qui ne vivent que de leur salaire, par delà les frontières. Le 
> projet d’une Europe supranationale n’était pas présent dans les débats 
> d’avant 1914. Et le drapeau rouge était celui d’une internationale de 
> travailleurs dont il espérait qu’elle puisse vaincre les 
> nationalismes. De quel droit, les dirigeants sociaux-démocrates 
> d’aujourd’hui se permettent-ils d’effacer le drapeau rouge ? De quel 
> droit un parti politique se permet-il de s’approprier un document 
> historique et de le travestir ? De quel droit un appareil partisan 
> ose-t-il défigurer un moment aussi capital d’une vie ? 
>  
> Jean Jaurès n’appartient pas à un parti. Il appartient au peuple.
>  
> Hier, Jacques Brel questionnait :
> Demandez-vous belle jeunesse
> Le temps de l’ombre d’un souvenir
> Le temps du souffle d’un soupir
> Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?
>  
> Aujourd’hui, demandons-nous, Citoyennes, Citoyens : pourquoi tuent-ils 
> encore Jaurès ? »
>  
> Raoul Marc JENNAR
>  
>  
> Contact à Maraussan : Geneviève Laffitte : tihuanacu@almageste.net
>
>
>  



 
 
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